CONFÉRENCE DE PRESSE DE MONSIEUR JEAN-CHRISTOPHE DEBERRE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MLF – BEYROUTH LE 22 JUIN 2018

CONFÉRENCE DE PRESSE DE MONSIEUR JEAN-CHRISTOPHE DEBERRE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MLF – BEYROUTH LE 22 JUIN 2018

À  toutes et à tous, j’adresse mes remerciements pour avoir répondu à notre invitation. En effet, le moment est venu pour la Mission laïque française de s’exprimer publiquement sur la grave crise qui secoue depuis des semaines ses établissements au Liban et de donner son éclairage sur la façon dont elle y a réagi. Je le ferai avec Maître Mohamed Alem, notre avocat qui, avec ses collègues, a accompagné la Mlf durant toute cette période et que je remercie de sa présence aujourd’hui.

Nous accompagnent les proviseurs des cinq lycées de la Mission laïque française au Liban, ainsi que les directeurs adjoints libanais ; tous ont été au premier rang de cette crise qu’ils ont gérée avec patience, dans la préoccupation constante de maintenir pour les élèves un climat qui ne nuise pas à leur scolarité, et de maintenir un dialogue constant et toujours positif avec les professeurs, que je salue également.

Beaucoup de commentaires, d’interprétations, de mises en cause, d’accusations même,  ont circulé ; pourtant,  durant tout ce temps, la Mlf n’a pas voulu y répondre « à chaud » pour deux  raisons:

D’abord, ses établissements étaient et sont encore pour certains assignés devant les juges des référés. Il ne nous revenait pas, par principe,  de commenter ce que fait la justice, ou d’intervenir sur ce qu’elle s’apprête à dire. Aujourd’hui, des accords ont été signés dans 3 établissements sur 5 ; cette situation nouvelle autorise par conséquent à commencer de  tirer les leçons de ce qui s’est passé.

D’autre part, nous avons longtemps cru que la raison prévaudrait pour appliquer la loi 46 du 21 août 2017, qui porte augmentation des salaires. La raison, cela signifie quoi pour nous ? Simplement que la loi soit respectée et que son application soit bien comprise, concertée et acceptée par les parties prenantes : l’Etat, les parents, l’administration du lycée. Dès que nous avons compris qu’il n’y aurait pas d’aménagement de la loi par le législateur et les pouvoirs publics, nous avons proposé des modalités d’application raisonnables parce que nous sommes parfaitement conscients que pour beaucoup de familles, ces augmentations sont douloureuses. Nos propositions n’ont pas été retenues, elles n’ont même pas été entendues. En lieu et place, et alors que la loi prévoit que les litiges soient portés devant les conseils arbitraux, la saisine des juges des référés par les comités de parents,  a, comme c’est l’effet souhaité,  bloqué toute solution, y compris celle d’appliquer la loi 46. Peut-être ces comités ont-ils estimé qu’ils n’avaient pas d’autre choix mais ils connaissaient les conséquences. Mais nous, dès ce moment-là, nous n’avions donc pas d’autre choix que de nous taire et attendre.

Donc, nous avons  fait preuve de beaucoup de patience au point que certaines institutions, en France et au Liban, et un nombre croissant de parents se demandaient pourquoi nous ne réagissions pas. Qu’est-ce qui nous  a décidés à le faire ? Les fausses informations (les fake news), les calomnies,  les injures sur les réseaux sociaux, abondamment utilisés, nous les avons endurés ; mais l’attaque en règle et les menaces personnelles contre deux de nos proviseurs et contre la Mission laïque française qui gère ici 5 lycées nous ont obligés à sortir du silence. Quand on s’attaque aux personnes, aux institutions, on devient soi-même complice et coupable si on ne dit rien. Le 25 mai, le président de la Mlf et moi  avons donc écrit à tous les parents du Grand lycée pour leur faire passer le message suivant : cela suffit, votre lycée est en danger, nous n’avons plus affaire à des contestations telles qu’habituellement la loi prévoit de les régler, nous avons affaire  à une volonté  évidente de ne pas surmonter la crise et une stratégie concertée pour ne pas trouver les bonnes solutions. Cet acharnement   est contraire à l’intérêt de vos enfants, et nuit aux lycées que vous avez-vous-mêmes choisis pour eux.

C’est cette raison-là qui nous invite aujourd’hui à parler  devant la presse dont le métier est de  comprendre, expliquer, commenter.

Maintenant, permettez-moi de résumer concrètement la ligne de conduite de la Mission laïque dans cette affaire, ce qui ensuite permettra de répondre à vos questions.

1- Comme la plupart des établissements privés payants, la Mlf s’est immédiatement aperçue, après le 21 août 2017, que si elle devait payer la grille et les échelons exceptionnels prévus par la loi, il lui fallait soit les moyens immédiats pour le faire, soit le temps nécessaire pour rendre cette charge moins dure pour les parents.

Mais à aucun moment il ne lui est apparu possible de discuter, aménager, tergiverser sur la loi. Aucun aménagement dans le temps n’étant prévu pour appliquer cette loi, c’est la première solution qui s’imposait. La Mlf a donc  très vite dit aux enseignants  qu’elle paierait  la grille avec effet rétroactif, et qu’elle paierait les échelons à partir de mars 2018, pourvu qu’elle ait les moyens de le faire. Elle a construit ses budgets en conséquence comme le veut la loi 515/96, en intégrant les charges nouvelles imposées par la loi 46.

2- Les comités de parents ont refusé de signer les budgets qui leur étaient ainsi présentés et c’est leur droit; mais au lieu d’en appeler aux tribunaux d’arbitrage éducatifs, et sans envisager d’autres possibilités,  comme si l’intérêt général était menacé,  début mars ils ont saisi les juges des référés qui immédiatement ont bloqué toute augmentation des droits de scolarité. De ce fait, la loi 46 ne pouvait être appliquée ; la Mlf a donc décidé de revenir aux salaires de 2016-2017, elle l’a dit aux enseignants. A partir du 26 avril, ces derniers se sont mis en grève ouverte mais ils ont assuré pour beaucoup d’entre eux leurs responsabilités, notamment en accueillant les élèves des classes à examen.

3- Le dialogue ne s’est pas arrêté pour autant entre notre avocat et les avocats des comités de parents. Pour le lycée Nahr Ibrahim, et le GLFL, il a été directement relayé par une médiation de M. le Ministre de la Justice, auquel nous sommes très reconnaissants de son intervention personnelle ; elle montrait que la situation était absurde, dangereuse, contraire au processus normal de résolution des différends tel que le prévoit la loi 515. Nous savons aussi que M. le Premier Ministre se tient près du dossier pour qu’il trouve une issue favorable.

Mais plus ce dialogue avançait, plus nous nous sommes rendus compte que la recherche de solution était différée sous des prétextes toujours nouveaux, revenant en particulier à cela et pardonnez-moi d’être brutal : il ne s’agissait pas d’aider les lycées à trouver la bonne réponse à la loi, il s’agissait de dénoncer, et d’accabler la Mlf sous les accusations suivantes : « elle n’est pas transparente, elle a de l’argent, elle « vole » les parents, elle peut payer ». Or, la conformité à la loi 515 des budgets que nous présentons est effective ; les droits de scolarité demandés aux parents ont certes augmenté chaque année, et on peut le regretter, mais toutes ces augmentations sont justifiées ; et il est clair que nos établissements ne gardent leur compétitivité que parce qu’on y investit pour qu’ils soient à la hauteur de leur mission ; or, ce sont les mêmes parents qui le veulent, et exactement les mêmes qui nous le reprochent au moment où une augmentation   est décidée,  alors même qu’elle n’est absolument pas de notre fait puisqu’il s’agit d’une décision de l’Etat.

4- Les 3 accords aujourd’hui trouvés (Verdun, Nahr Ibrahim, Nabatieh) nous font exactement revenir au point de départ, c’est-à-dire aux propositions initiales de la Mlf : paiement immédiat de la grille (en moyenne, augmentation de +8% des droits de scolarité) et paiement différé des échelons selon les situations, ce qu’ont admis les professeurs. Autant dire que pour nous, cette  crise est un temps entièrement perdu, un temps d’angoisse et de destruction inutiles,  et dont on pouvait parfaitement et en bonne intelligence faire l’économie.

5- Nous sommes reconnaissants à nos autorités et particulièrement M. L’Ambassadeur de France au Liban d’avoir soutenu la Mlf et bien au-delà l’enseignement français au Liban, et quand il le fallait d’avoir pesé pour débloquer la situation : c’est grâce à son intervention que pour Nabatieh, le poste budgétaire du proviseur a été repris par le budget français, permettant donc ainsi d’alléger la charge qui pèse sur les parents.

Quelles sont nos conclusions ?

D’abord que malgré cette crise unique par son ampleur et la violence des attaques et des mauvais procès, nos lycées finissent l’année dignement : les résultats sont là pour le prouver ; et je remercie  les professeurs pour la plupart d’entre eux été aux côtés de la Mlf, leur institution et leur employeur dans cette épreuve.

Je note aussi que la préparation de la rentrée s’effectue normalement et que les parents dans leur immense majorité restent fidèles à notre enseignement, qui leur inspire confiance.

Mais nous ne pouvons pas en rester là : il est clair  que la diffamation et les mises en cause personnelles sont à l’opposé des principes de l’éducation que les parents veulent pour leurs enfants ; il faut en tirer la leçon et que ceux qui ne sentent pas bien dans ces établissements et qui l’ont écrit, les quittent au  lieu de leur nuire.

Pour notre part, notre action dans les mois et années qui viennent sera articulée sur trois objectifs : plus de communication encore pour assurer les parents de la rigueur de notre gestion et éviter les attaques malsaines et inutiles ; plus d’exigence et plus de communication sur la qualité pédagogique que nous ne cessons de promouvoir et c’est ce que veulent d’abord les parents; plus de proximité enfin avec eux et d’efforts pour que la communauté parentale soit soudée autour de l’éducation de leurs enfants et non fracturée, divisée pour des mauvaises raisons, qui distraient de l’essentiel, l’éducation.

Enfin, nous ne pensons décidément pas que des représentations parentales rendent service  quand elles harcèlent les établissements pour des économies incessantes, alors que chacun sait que les mêmes veulent pour leurs enfants une bonne école. Le dialogue, oui, la rigueur d’une saine et bonne gestion, oui, mais certainement pas les diktats d’une cogestion qui se drape derrière l’intérêt général : à  chacun son métier.

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