Poèmes à la manière de Francis Ponge, par les élèves de Première B

Poèmes à la manière de Francis Ponge, par les élèves de Première B

 

Après avoir découvert l’univers surréaliste de Francis Ponge dans le Parti pris des choses où l’auteur nous invite à regarder d’un œil nouveau les objets du quotidien, les élèves de 1ère B se sont essayés à l’écriture de poèmes en prose dans lesquels ils transmettent des petites leçons de vie à travers des « ob-jeux » (néologisme inventé par Francis Ponge fabriqué à partir de deux mots : objet et jeu). Dans ces petits textes, ils s’inspirent d’éléments que nous ne regardons plus. Le quotidien est transfiguré grâce l’écriture poétique. Certains élèves vont plus loin en détournant l’image de l’objet dans des photographies à la manière de Man Ray.

 

LE PINCEAU ARTISTIQUE

Le pinceau artistique est manipulé par la créativité et par l’originalité de son maître. Cet outil est guidé par une main flexible qui suit les idées de l’artiste talentueux.

Ce petit pinceau voyage et migre vers les pôles de la toile, tout en laissant une trace sublime.

Tout en mouvement, le peintre, l’esthète, admire son frottement contre la toile toute blanche qui crée une symphonie apaisante et relaxante.

Ce petit objet semble être banal mais en fait, au contraire, il est un des éléments les plus importants dans l’art ; c’est un moyen de communication et d’échange entre les pensées et la toile magique.

Il a des capacités surprenantes : il se déplace d’un coté à un autre, de façon assez fluide et délicate. On sent l’esprit maritime arriver, on imagine les vagues qui suivent le mouvement du vent.

Ce pinceau artistique dessine des couleurs resplendissantes et symboliques. Cela permet de créer un enthousiasme et une sorte d’apaisement chez le public, d’où règne dans son espoir une certaine vivacité, félicité et gaieté.

Une fois usé, ce pinceau créatif se métamorphose en un simple bâtonnet qui n’a plus aucune valeur, ni saveur.

Yara Andraos

          LES TOUCHES DU PIANO

Comme une ballerine qui danse, en extrayant toutes émotions, les touches de piano dansent. Tout en claquetant leurs pieds, fortement ou plus doucement que jamais.

Noirs, Blancs, tous sont concernés par ce beau spectacle de danseurs. Par peur de gêner, ils s’affaiblissent pour laisser place, à la plus fine des danseuses.

Et par un élan de courage, ils s’élancent tous comme dans un naufrage, pour enfin achever ce voyage qui s’éteint comme une cigarette, laissant une trace dans les poumons de ceux qui écoutent avec passion.

                                                   Gwendelyn

          LE CHOCOLAT AU LAIT

Une beauté implicite, relativement commune et lassante. Certains diront même, que son extérieur est tout simplement provoquant par le fait qu’elle n’enfile pas son manteau blanc mais se contente de demeurer nue, mettant donc en avant sa couleur qui serait décrite ainsi : une flaque de boue par une sublime une journée de pluie. D’autres, feront une remarque sur l’absence de toute forme ou courbature sensuelle dans son corps raide et rigidement encadré.

 

Mais l’ignorance s’empare d’eux, car seules les lèvres les plus sûres  sont celles qui auront le courage de se tenir au contact de cette peau délaissée d’amour, d’explorer ce territoire inconnu à d’autres, avant de réaliser qu’une expérience exquise les attendait. Une saveur et douceur, une sensation inexplicable en sera leur récompense, ils seront rendus muets. Ils ne regretteront surtout pas d’avoir choisi de devenir amants à cette figure qui révèle enfin ses pouvoirs divins et sa beauté unique.

 

Raté par certains, qui laissent passer une telle opportunité. D’ailleurs, ce n’est pas par raison : ils ne savent pas se faire plaisir.

 

La sentence est irréversible pour ceux qui ont réussi à ignorer ces préjugés superficiels et à  jouir de son goût : ils sont désormais esclaves du charme éternel de ce goût extraordinaire qui vous fait oublier l’absence d’un corps sinueux.

 

Cette expérience de dégustation du chocolat est en elle-même une aventure pour l’imagination durant laquelle l’individu visite le paradis.

                                                             Jessica

          LIVRE

Un petit volume plein de connaissances et un vivier plein de richesses. Il peut se déplacer facilement et emprunte avec lui une valise de connaissances. Un petit objet dont la valeur est grandiose et immense. Ce n’est pas sa taille qui compte, c’est son contenu qui lui donne toute son importance.

 

À travers la plume on y fait habiter de nouveau locataire. Dans ces pages il se décline en 26 catégories dans lesquelles priment l’homogénéité mais dont les expressions varient selon le voisinage.

 

Chaque page est ainsi une ville où s’exerce la pluralité dans la diversité des mots mais qui s’assemblent en quartier pour exprimer des idées communes. On vole donc de ruelle en ruelle, d’avenue en avenue, en découvrant ce que l’architecture veut bien nous dévoiler.

 

Ainsi nous nous perdons avec plaisir dans l’antre de la pensée de l’auteur qui nous bouleverse de page en page et nous fait rêver, organisant ainsi un voyage de l’esprit du ciel aux enfers.

 

                                                             Roy

          LA PORTE 

Une porte est une passerelle. Elle permet de fuir d’un endroit à un autre. Elle construit le lien entre les deux mondes. Elle vous attire de votre zone de confort vers le monde extérieur terrifiant.

Une porte a vu beaucoup de choses durant sa vie et se présente sous toutes les formes et les tailles. On sait que derrière cette porte se trouve un ivrogne quant il y a un milliard de rayures sur le trou de la serrure d’où il a essayé, et n’a pas réussi, à insérer sa clé. On sait que derrière celle-ci, c’est un artiste quand on voit de petites taches de peinture ou de fissures là où il aurait cogné sa guitare. Et on sait que derrière celle-là, il y aura une paisible famille s’ils y auront laissé une petite trappe pour leur chien.

Ainsi, une porte détient derrière elle un million de vies et de personnalités différentes qui peuvent être trouvées partout dans le monde.

D’une manière ou d’une autre, nous aspirons tous à être cette porte. Nous aspirons tous à faire partie de tant de vies et d’histoires.

Mais sommes retenus par un battement de cœur : le fait que nous soyons vivants. On doit se familiariser de plus en plus avec notre coté objet, notre coté inerte pour avoir le courage de prendre le risque.

Ce que nous ne comprenons pas, c’est que tout ce que nous devons faire est prendre un risque, être confiant et ouvrir la porte.

Karen

 

          LE CRAYON

Issu des plus affreux gisements de graphite, le crayon mine n’a pas hésité à triompher. Le passage de la boue à l’or de ce crayon est merveilleux. Il passe du spleen à l’idéal.

 

Nous créons avec ce crayon des mondes, des maisons, des dessins et nous résolvons des équations. Ce crayon coûtant peu d’argent et de plomb a une valeur immense.  Il permet de façonner des choses comme il permet de les effacer. Ce crayon est magique.

 

Sa vie est déterminée en fonction de son utilisation mais les traces  laissées par lui resteront.

Des choses les plus minables  du monde on peut créer du diamant. Le passé et le futur de ce crayon ne compte pas, c’est à son présent qu’il faut s’intéresser.

Joe

 

          LE FER A REPASSER

Le fils de Satan, aussi doué des pouvoirs divins de son père, le Fer à repasser trace son propre chemin.

Forgée dans les feux de l’enfer, le Fer exprime sa colère et refrène nos malheurs par sa grande chaleur.

De même que les êtres humains, le Fer n’est pas parfait, ses actions sont incomplètes. Il reprend son trajet, afin de compléter son objectif. C’est ainsi qu’on dit: “Le Fer a repassé… est repassé”.

Et n’oubliez point, son apparence peu trompeuse : d’un touché il peut vous brûler.

Les années passent et le Fer repasse, mais avec la technologie, il est emprisonné comme dans un mythe : limité par les pouvoirs de Zeus, il n’est qu’esclave de l’humanité.

Le Fer à repasser et est très apprécié est aujourd’hui recommandé.

Abdul Aziz

 

          LE LIVRE:

Le livre, chair de carbone, morceau d’arbre, arraché du cœur de ce dernier, trouble de la biodiversité et assassin des oiseaux et des insectes.

Toi, voyageur dans le temps, vieillard millénaire. Passant d’une simple feuille de plante brute à un produit industriel blanchit chimiquement.

Le livre, fidèle compagnon muet de nos jours et de nos nuits, vitrine de nos cultures, de langue, de bon sens et d’histoire. Tu es l’inscripteur de nos vies, de nos rêves, de notre folie et de la science.

Toi, changeur d’esprit, précepteur de la raison et de la logique. D’une part, tu nous guides et tu nous apprends des nouveautés pour progresser et briller. Et d’une autre part, tu écoutes notre voix interne et nos sentiments.

Chère livre, délaisse dans la poubelle du temps par ces générations d’esprits cadrés et limités. Ne reconnaissant sa perte, il le considère vieux. Ils ne savent pas que le livre ne meurt jamais et revivra pour toujours.

Le livre est atemporel.

                                                     Zoyie SASSINE